SOURCE : info-afrique.com – Publié le 17 octobre 2021 par Vincent Garrigues
Dix-sept films seront en compétition pour le grand prix du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), le plus grand rendez-vous du cinéma africain qui se tient jusqu’au 23 octobre dans la capitale burkinabè. Les prix seront décernés par un jury présidé par le réalisateur et producteur mauritanien, Abderrahmane Sissako, lauréat du César du meilleur film pour Timbuktu en 2015, et par l’Egyptienne Jihan El Thari pour le documentaire.
La sélection officielle comprend huit catégories dont la compétition officielle, ainsi que la section Panorama, riche d’œuvres singulières sélectionnées par le festival, à l’instar de « Omar Blondin Diop, un révolté », coproduit par Elever la Voix Films. Quarante huit ans après la mort violente d’Omar Blondin Diop dans la prison de l’île de Gorée à Dakar, le réalisateur sénégalais Djeydi Djigo enquête sur la vie et les circonstances tragiques de la mort de ce jeune révolutionnaire des années Senghor.
« Nous sommes de jeunes africains, qui racontent un drame africain, explique Djeydi Djigo. Beaucoup de documentaires sur l’histoire africaine et nos grandes figures révolutionnaires sont des productions européennes, comme si l’Afrique refusait de raconter sa propre histoire. C’est pourquoi j’ai décidé de réaliser un film sur Omar Blondin Diop, un personnage complexe et peu connu du grand public. J’ai l’ambition qu’à travers ce documentaire bon nombre de jeunes du continent, mais aussi à travers le monde, pourront découvrir une grande histoire du 20 ème siècle, celle du Sénégalais Omar Blondin Diop. »
UNE OMBRE QUI ECLAIRE
Le réalisateur poursuit, convoquant les grands anciens : « Ousmane Sembene disait que le cinéma n’a de sens que s’il est engagé, nous faisons de cette assertion un leitmotiv. Quant à Djibril Diop Mambety, il parlait d’un devoir d’agression pour les cinéastes d’Afrique. Ce devoir d’agression se doit d’être un alliage du fond et de la forme comme le témoigne son cinéma. Nous voulons, à travers cette enquête, raviver la mémoire d’Omar, débusquer la vérité et vivifier son spectre qui continue à hanter le gouvernement sénégalais. Nous le présentons au monde, afin qu’il devienne, comme le disait Birago Diop, une ombre qui éclaire. »
En signant ce documentaire engagé, cet essai filmique autour d’une comète politique, Djeydi Djigo entend bousculer l’histoire officielle. Il fait acte de courage. « Omar Blondin Diop était tout d’abord un jeune homme brillant, avec un parcours académique d’excellence. On en parlait comme d’un futur homme politique majeur dans son pays, rappelle-t-il. Il était ensuite un révolté, un contempteur de la société et des débris du colonialisme, qui selon lui, étranglaient l’Afrique. Omar était donc un dilemme : intellectuel passionné par la culture française et intégré aux milieux de la bourgeoisie parisienne d’une part, ami du bas peuple et révolutionnaire qui a ébranlé le pouvoir sénégalais d’autre part. Cela sonne donc comme une évidence que sa mort fut polémique. J’ai retrouvé sa famille, ses amis d’enfance, ses compagnons de lutte, ses camarades de classe, ses gardes pénitentiaires et le juge en charge du procès l’ayant mené en prison. Beaucoup d’entre eux parleront pour la première fois de cette affaire, après moult refus à de nombreuses sollicitations précédentes. Une homogénéité se dégage des premiers témoignages et une constante demeure : c’était un homme complexe et brillant. Un rêveur sombre pour certains, un génie fauché à la fleur de l’âge pour d’autres. »
Et comme souvent dans les belles aventures artistiques et intellectuelles, un tandem s’est formé, qui donne au projet une ambition surmultipliée. Le partenaire s’appelle Eric Vernière, il est français, et sa société de production paraît bien nommée : « J’ai découvert l’histoire d’Omar Blondin Diop grâce à Djeydi Djigo, confie le patron d’Elever la voix Films. Une tragédie, et aussi une affaire d’Etat car les circonstances de la mort d’Omar Blondin en prison sont restées cachées pendant plus de 40 ans. C’est un épisode de l’histoire récente du Sénégal, qui s’inscrit dans la lente et difficile décolonisation du pays, que Djeydi tient à dévoiler, et qu’il nous semble passionnant de coproduire et de porter aussi à la connaissance du public français. ».
SOURCE : info-afrique.com – Publié le 17 octobre 2021 par Vincent Garrigues